Publié le 12 avr 2023Lecture 3 min
Une stratégie pour « les 1 000 premiers jours de l'enfant »
Vincent BARGOIN, Paris
Santé publique France souhaite mobiliser les médecins généralistes autour de l'enjeu que représente la période périnatale aujourd'hui pour la santé publique de demain.
Depuis une trentaine d'années, la notion s'est progressivement imposée du rôle important des stress vécus dans la petite enfance, voire avant la naissance, dans la santé de l'adulte. La notion est large, puisqu'elle inclut les stress physiques et psychiques, et leurs retentissements à vie. Mais elle est connue sur le plan médical : on sait par exemple qu'un retard de croissance intra-utérin impacte le risque CV après 50 ans. Une transmission intergénérationnelle est même envisagée, au moins dans des cas extrêmes. L'impact de la famine subie par la population néerlandaise durant l'hiver 44-45, s'est ainsi fait sentir sur le profil lipidique non seulement des personnes nées durant cette période, mais aussi chez leurs descendants. Sur le plan psycho-social également, la relation se vérifie : l'attention reçue par le petit enfant, joue un rôle dans sa capacité à engager des relations empathiques à l'âge adulte. Les 1 000 premiers jours de l'enfant, jusqu'à ses 2 ans en incluant les 270 jours de grossesse, déterminent largement l'avenir de l'individu. « Ces idées sont encore relativement récentes », précise le Dr Thierry Cardoso (Santé publique France). Elles ont néanmoins été reprises dans la déclaration de Shangai, votée en 2016 par l'OMS, qui fixe les grandes orientations jusqu'en 2030. Aux États-Unis par ailleurs, les recommandations du Center of the Developing Child (Harvard University) considèrent comme basés sur des preuves le besoin d'un « environnement relationnel stable et réceptif assurant la sécurité affective et relationnelle », le besoin d'un « environnement physique, chimique et bâti sûr et favorable », et le besoin d'une « nutrition adaptée pour l'enfant, dès la phase préconceptionnelle ».
En France, une initiative allant dans ce sens a été lancée par Santé publique France. Il s'agit du site 1000-premiers-jours.fr. Les rubriques « Devenir parent », « Agir sur son environnement », « Être accompagné », « Découvrir son enfant » et « Pourquoi 1 000 jours ? » s'adressent aux familles, sachant par ailleurs le nombre d'erreurs qui circulent sur les réseaux sociaux, et aux médecins. « L'accompagnement à la périnatalité est en plein dans le rôle du médecin de famille, souligne ainsi le Dr Cécilia Saldanha Gomes (Athis-Mons). Les médecins généralistes suivent d'ailleurs de plus en plus d'enfants ». Leur rôle est « d'encourager et guider », de savoir répondre à des questions du type « que doit-il manger ? ». Ou d'un autre type : « Suis-je une bonne mère, Docteur ? » Le Dr Saldanha Gomes réussit à faire tenir la philosophie de cet accompagnement en une image : « Un biberon heureux vaut mieux qu’un sein malheureux ». En pratique, l’accompagnement prend du temps. Tout commence avec l'entretien prénatal, puis l'entretien post-natal, lors duquel il est important de rechercher une dépression post-partum, souvent sous-estimée. Ensuite, il s'agit de suivre le développement de l'enfant, dans son environnement. Sur le plan physique, « une déviation neuro-développementale doit être dépistée très vite », souligne le Dr Saldanha Gomes, et déclencher « une action immédiate, alors que la plasticité du développement permet une correction ». Sur le plan de développement psycho-affectif, par ailleurs, il faut aussi pouvoir s'intéresser à la reprise du travail de la mère, au mode de garde, repérer les interactions parents-enfant... Quel temps est accordé à l'enfant ? En quantité ? En qualité ? Au médecin de prendre le sien pour poser ces questions. Est-ce réaliste ? C'est en tous cas nécessaire, dans un contexte qui n'est pas favorable. Début mars, l'Inserm publiait ainsi une étude montrant une augmentation de 7 % de mortalité infantile entre 2012 et 2019.
La stratégie de Santé publique France pour la promotion de la santé périnatale, annonce d'ailleurs, parmi ses objectifs, « une réduction des inégalités sociales et territoriales de santé ». Reconnaissant que « le médecin ne va pas y arriver seul », le Dr Saldanha-Gomes rappelle que d'autres acteurs existent dans l'accompagnement de la petite enfance, dont certains permettent d'ailleurs de « démédicaliser » la relation parents-enfant. Dans la « boîte à outils territoriale », on compte notamment les équipes pluriprofessionnelles de la petite enfance, les réseaux Périnat, les PMI, les Centres de Planification et d’Éducation Familiale (CPEF), les Crèches, les Relais Assistantes maternelles, le cas échéant les services sociaux, mais aussi – pourquoi pas ? – les ludothèques, puisque dans l'esprit du projet, pour bien commencer l'avenir des enfants, il est important d'apprendre aux parents à jouer avec eux.
Voir Le petit guide de la diversification alimentaire
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