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ORL

Publié le 08 jan 2025Lecture 5 min

Trouble du sommeil chez l’enfant, et si c’était le nez ?

Denise CARO, d’après les communications de Vincent Couloigner et Romain Luscan (hôpital Necker, Paris)

Face à des troubles du sommeil chez l’enfant, il faut penser à une obstruction nasale et en rechercher la cause. Pour cela, il ne faut pas hésiter à faire un examen nasofibroscopique qui évitera de passer à côté de diagnostics auxquels on ne pense pas toujours. Chez le nouveau-né, il s’agit le plus souvent d’une malformation congénitale, responsable d’une symptomatologie bruyante. Chez l’enfant et l’adolescent, l’imagerie s’impose au moindre doute.

L'obstruction nasale est souvent associée à des spécificités anatomiques. Durant les premiers mois de vie, le larynx haut situé et le voile long, utiles à la fonction de têtée, entraînent une obstruction nasale potentiellement responsable d’une bradypnée inspiratoire, avec tirage sous-mandibulaire, voire d’une détresse respiratoire. Au-delà de cet âge, l’obstruction nasale a un retentissement sur la croissance faciale avec un faciès adénoïdien, un palais étroit et ogivale, une mandibule rétruse et des anomalies d’orientation des dents. Cela gêne, entre autres, la tolérance d’une CPAP (continuous positive airway pressure). L’amygdalectomie ne résout pas toujours entièrement l’obstruction nasale et les troubles du sommeil ; pour preuve, on constate un pourcentage non négligeable de SAOS résiduel après l’ablation des amygdales. D’autres obstacles des voies aérodigestives supérieures (VADS) peuvent être impliqués. Et quoi qu’il en soit, l’efficacité de l’amygdalectomie est moindre avant 3 ans et après 7 ans(1), dans les SAOS sévères(2) et, en cas de comorbidités, telles que l’obésité(3), des malformations crâniofaciales, une trisomie 21 ou un syndrome de Prader-Willi(4). Chez des enfants avec un SAOS de type 1 et 2, le degré d’obstruction nasale rhinopharyngée et vélaire, ainsi que le nombre de sites obstructifs par patient et leur sévérité globale, diminuent avec l’âge ; l’obstruction rhinopharyngée est surtout prévalente chez les enfants d’âge préscolaire (hypertrophie des végétations). En revanche, le degré d’obstruction oropharyngée, de la base de la langue et aryténoïdienne ne varient pas avec l’âge(5).   La rhinopharyngite, principale responsable d’obstruction nasale Parmi les causes d’obstruction nasale chez l’enfant, les rhinopharyngites arrivent en tête, notamment durant la période d’immaturité physiologique du système immunitaire (de 6 mois à 4 ans), avec un bénéfice potentiel des lavages pluriquotidiens au sérum salé(6). Autre cause fréquente, l’hypertrophie des végétations également favorisée par l’immaturité immunitaire, mais que l’on peut aussi retrouver chez l’enfant plus grand. Elle peut être responsable de SAOS sévère avec une cassure de courbe pondérale chez le nourrisson. Face à une obstruction nasale, il faut savoir penser à une rhinite allergique observée chez 35 % des enfants avec ronflements primaires et 6 % des enfants avec SAOS. Celle-ci semble être positivement corrélée à la sévérité du SAOS et à un échec de l’amygdalectomie et de l’adénoïdectomie. Le diagnostic est évoqué sur la clinique (prurit, anosmie, rhinorrhée, éternuement et obstruction nasale) et les allergènes responsables sont recherchés par des tests cutanés utilisables à tous âges ou éventuellement par dosage des IgE spécifiques. L’éviction des allergènes, des lavages de nez au sérum salé, la prescription d’antihistaminiques et/ou de corticoïdes locaux à partir de 3 ans, constituent les éléments thérapeutiques. Éventuellement, une désensibilisation peut être envisagée à partir de 5 ans. Une rhinite chronique non allergique peut également être responsable d’obstruction nasale et de SAOS. Face à une forme invalidante résistant au traitement médical, il est possible de proposer une turbinoplastie au laser thulium ou une turbinectomie partielle, cette dernière ayant une meilleure efficacité avec un peu plus d’effets indésirables. Enfin, une obstruction nasale peut être due à une rhinosinusite chronique ; le tableau clinique comportera alors une rhinorrhée purulente, des algies faciales à la pression et une toux. La fibroscopie nasale montre un œdème muqueux, des sécrétions purulentes et des polypes. Un épaississement muqueux au niveau des sinus ou du complexe ostioméatal (coin interne de l’œil) est vu au scanner. Chez l’enfant et l’adolescent, il ne faut pas hésiter à compléter le bilan par scanner et/ou une IRM au moindre doute. L’imagerie pourra révéler : des polypes nasosinusiens, un polype unilatéral antrochoanal de Killian (bénin mais pouvant récidiver après chirurgie), un fibrome nasopharyngien, une déviation septale (possible aussi chez le très jeune enfant) ou une tumeur maligne (rhabdomyosarcome). Et face à une rhinorrhée purulente unilatérale, il faut penser à un corps étranger. Chez le nouveau-né, en dehors des malformations congénitales, la principale cause d’obstruction nasale est la rhinite du nourrisson dont l’origine n’est pas claire (infection, RGO, iatrogénie, etc.). L’obstruction nasale s’accompagne d’une rhinorrhée mucoïde et d’un œdème de la muqueuse. On propose des lavages de nez doux (ou avec de l’adrénaline en milieu hospitalier) ou une corticothérapie locale (hors AMM), éventuellement un traitement anti-reflux.   Quelques causes rares à ne pas omettre chez le nourrisson À côté de principales causes d’obstruction nasales que l’on vient d’énumérer, il en existe de bien plus rares qu’il ne faut cependant pas omettre. Chez le nouveau-né, il peut s’agir d’une sténose congénitale des orifices piriformes avec un vestibule narinaire étroit, une absence de frein de la lèvre supérieure et une incisive médiane unique. Cette malformation congénitale rare est responsable de détresse respiratoire. Le diagnostic est confirmé au scanner et un bilan de l’axe hypophysaire recherchera des anomalies associées. Le traitement est chirurgical. De façon un peu déroutante, les kystes lacrymonasaux peuvent être responsables de troubles respiratoires importants chez le nouveau-né, en formant une grosse boule à l’entrée du nez. Il suffit de saisir la boule, la tirer, ce qui permet de dégager les sécrétions lacrymales. Des œdèmes des paupières et un larmoiement sont parfois associés. D’autres causes sont vraiment rares. Tel est le cas d’une craniosténose (midface stenosis) avec une réduction des fosses nasales, responsable de troubles respiratoires ou d’atrésies choanales bilatérales, avec une obstruction complète du fond des fosses nasales. Des formes unilatérales se voient plus fréquemment chez l’enfant plus grand. Il faut rechercher un syndrome de CHARGE (coloboma heart atresia [choanaes] retardation genital ear). Le gène impliqué est le CHD7. Le traitement est chirurgical. Encore plus rares, les méningocèles et méningo-encéphalocèles dues à des anomalies de fermeture et des brèches à l’étage antérieur, avec une issue de méninges et parfois d’encéphale (vues à l’IRM). Là encore, le traitement est chirurgical (par voie endonasale). Enfin, citons deux autres raretés : l’hétérotopie neurogliale correspond à du tissu cérébral mature au niveau du dorsum du nez et ne communiquant pas avec le cerveau ; et un tératome, tumeur d’origine embryonnaire, responsable de détresse respiratoire majeure (il faut rechercher les alphalipoprotéines).

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